Grèce : une lettre piégée pour Sarkozy interceptée
ATHÈNES
Le Figaro
02 nov. 2010
ALEXIA KEFALAS
ANARCHISME Lundi matin 11 heures, Athènes ressemblait à une copie de Washington sous la menace d’al-Qaida. Le quartier de Pagrati était quadrillé par des policiers mis en alerte par une employée d’un centre de tri après l’explosion d’un colis suspect. Ce paquet piégé était adressé à l’ambassade du Mexique en Grèce, un autre, du même type avait pour destinataire l’ambassade des Pays-Bas. Deux jeunes présumés extrémistes de 22 et 24 ans sont arrêtés en possession d’armes de type Glock, de gilet pareballes, et de deux enveloppes. À l’intérieur de celles-ci des livres recouvrant des engins explosifs, de la poudre explosive et des câbles. L’une était destinée à l’ambassade de Belgique en Grèce et la seconde, au président Nicolas Sarkozy.
Si la police prend l’affaire très au sérieux, son porte-parole, Thanassis Kokalakis, relativise « l’affaire apparaît de fait assez ridicule, dans le cas de M. Sarkozy il est évident que ce paquet n’aurait jamais pu atteindre son desti
nataire », d’autant que « l’expéditeur
de la lettre pour le président français était Théodore Pangalos, le vice-pre
mier ministre grec », ironise-t-il. L’un des jeunes gens arrêtés était recherché par la police pour appartenance à l’organisation terroriste « conspiration des cellules de feu », une organisation née après les violences urbaines de décembre 2008 et ayant revendiqué plusieurs attentats. Le second était aussi connu des services de police.
Menaces sur les ambassades
C’est la raison pour laquelle Dimitri Bekiaris, analyste en politique inté
rieure, estime « qu’il s’agit de messages purement anarchistes contre les politiques conservatrices de la France, des Pays-Bas et de la Belgique. S’agissant du Mexique, l’un des chefs anarchistes a été arrêté récemment, il y aurait donc un lien » . Si le colis piégé avait très peu de
chance d’arriver à l’Élysée, « il ne faut pas exclure la possibilité d’attentat contre les ambassades à Athènes. Il y a quatre mois, ce même type de colis est parvenu au bureau du ministre de la Protection civile et a explosé dans les mains de son plus proche collaborateur » , met en garde Dimitri Bekiaris
Un attentat au colis piégé touche la police grecque à la tête
ALEXIA KEFALAS ATHÈNES
Le Figaro
26 juin 2010
TERRORISME Le porte-parole de la police grecque Thanassis Kokkalakis, est catégorique « cet attentat terroriste avait un seul but: tuer» . L’explosion du colis piégé de jeudi soir, à quelques mètres du bureau du ministre de la Protection civile, aura
coûté la vie à son chef de la sécurité : Georges Vassilakis, 52 ans, qui travaillait aux côtés du ministre depuis plusieurs années. « La bombe visait certainement le ministre» , ajoute Thanassis Kokkalakis, « il est à l’origine du démantèlement de l’organisation terroriste du 17 novembre, en 2003, et depuis son retour au ministère, il y a neuf mois, nous menons une politique antiterroriste des plus drastiques» . La police enquête sur plusieurs pistes dont celle de la «lutte révolutionnaire» (EA), appartenant à la liste des groupes terroristes référencés par l’Union européenne, mais n’exclut pas l’apparition d’une nouvelle organisation. « Il n’y a eu aucune menace préalable, ni revendication pour le moment et il est difficile d’avoir des traces de ce colis puisque l’explosion a tout détruit dans le bureau», conclut-il. Dans l’opinion publique, c’est la consternation et une question taraude la presse nationale: comment un tel colis a-t-il pu arriver au septième étage du bâtiment le mieux gardé de Grèce, au siège de la police ? Les critiques pleuvent sur la gestion des forces de l’ordre, les contrôles des entrées du ministère et plus largement la menace qui pèse sur l’État.
Climat social tendu
Les commentateurs s’interrogent sur l’origine de ce drame qui intervient dans un climat social des plus tendus. Selon l’expert en terrorisme Athanasios Drougos, « il y a peut-être là un message de colère là où les grèves et manifestations répétées n’ont pas d’écho. Mais au-delà de la tragédie, cet attentat est intervenu la veille du vote de la réforme des retraites au gouvernement. Quand une menace pèse sur la sécurité du pays, il est rare de s’opposer aux réformes, malgré les tensions au sein du gouvernement », insistet-il. La réforme des retraites a été adoptée en Conseil des ministres et sera soumise mardi au Parlement, jour de la grève générale. En attendant, les forces de l’ordre sont sur le qui-vive pour éviter tout nouvel attentat.
Pour Dimitri Bekiaris, analyste en sécurité intérieure, ce n’est qu’un début, « le terrorisme ne meurt jamais en Grèce», souligne-t-il. « Cet attentat est le point de départ de nouvelles violences dans la société. Il avait pour but de déstabiliser l’intégralité du système politique et économique. Il porte un message clair, une menace pour tous ceux qui veulent investir en Grèce, une forme de nationalisme qui devient de plus en plus violent» , déplore-t-il. Les résultats de l’enquête sont attendus en début de semaine prochaine.